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Vendredi 23 février 2024, 22h10
Des armes américaines et européennes ? Le plus pratique dans cette guerre, c’est le Soviétique, car avec le reste, nous avons toujours des problèmes d’approvisionnement. Avec les armes soviétiques, nous savons que si nous manquons de munitions, nous avons toujours la possibilité d’utiliser celles que nous avons capturées à l’ennemi. C’est la réflexion que fait le principal instructeur militaire de la 22e brigade de l’armée ukrainienne, interrogé sur l’arsenal de ses forces.
La guerre dure depuis deux ans et Kiev a constitué une armée à marches forcées qui s’est développée sous la protection d’un soutien occidental qui commence à faiblir au moment le plus délicat. L’offensive ukrainienne de l’été a été un échec qui a coûté des milliers de vies et n’a pas permis de gagner du terrain, et maintenant les Ukrainiens sont sur la défensive et accélèrent la préparation de soldats qui n’ont jamais mis les pieds sur le front pour tenter d’arrêter l’offensive ukrainienne. Les Russes avancent et, en une semaine, ils parviennent à s’emparer d’Avdiivka et de Poltava. La ligne de front s’étend sur plus de mille kilomètres et il faut de nombreux hommes pour la défendre.
Les terrains d’entraînement sont à quelques kilomètres des positions russes, les emplacements changent pour éviter les attaques de drones et on y accède par des routes rurales impraticables à cause de la boue noire dans laquelle s’enfoncent les SUV les plus puissants. Dans une forêt perdue au milieu des interminables plaines du Donbass, les hommes de la 22e Brigade reçoivent le « stage de préparation avancée » qui leur ouvre les portes du front de combat. L’âge moyen est élevé et la majorité n’a jamais utilisé de lance-roquettes ni lancé de grenade, armes importantes dans la guerre des tranchées.
Les clés
Le scénario
Les entraînements se déroulent à quelques kilomètres des positions russes, parfois dans des forêts perdues
La formation
L’exercice final est un entraînement sur cible avec une photo de Poutine au centre de la cible.
«C’est mon deuxième tir avec un RPG et je veux apprendre rapidement. Il est clair qu’il nous faut des munitions, des obus d’artillerie, des mines… mais aussi des avions et des chars», explique Tihonia, prénom d’un soldat du Dnipro qui est dans l’armée depuis un an et qui devra bientôt combattre l’ennemi en les tranchées. Les fossés sont creusés dans une terre noire et humide et traversent les champs comme des cicatrices sans fin dans lesquelles les combattants sont de minuscules fourmis qui montrent à peine la tête.
Paiement de pots-de-vin
Au début de la guerre, les Ukrainiens se sont portés volontaires pour défendre leur pays, mais au fil des mois, de plus en plus de gens font tout leur possible pour éviter de détenir un fusil et se cacher chez eux ou chercher des moyens de payer des pots-de-vin. Les autorités envisagent de modifier la loi pour mobiliser de nouvelles recrues et sont confrontées à un problème d’âge puisque le soldat moyen dans l’armée a aujourd’hui 43 ans, selon les informations consultées par le magazine ‘Time’. Une moyenne de dix ans de plus qu’en mars 2022, un mois après le déclenchement du conflit. Interrogé à ce sujet, un collaborateur du président Volodymyr Zelensky a avoué dans la même publication que “ce sont des hommes adultes et certains d’entre eux en mauvaise santé (…) Nous sommes en Ukraine, pas en Scandinavie”.
Lance-roquettes, fusils et munitions flambant neufs d’origine russe. Le tout bien emballé et transporté directement à l’avant. Les soldats testent leurs armes, pénètrent pour la première fois dans une tranchée pour apprendre à se déplacer et à lancer des grenades sur l’ennemi, s’entraînent aux opérations d’assaut et s’entraînent également à évacuer leurs collègues. Le nombre de morts et de blessés est un secret d’État, mais des sources des renseignements occidentaux l’évaluent à 500 000.
«La situation est de pire en pire, elle devient de plus en plus difficile et il semble que nous n’aurons pas assez de force pour passer la prochaine étape, mais nous y sommes parvenus. D’une manière ou d’une autre, nous trouvons la force et avançons car il n’y a pas d’autre option. “J’essaie de former le plus de militaires possible et j’espère que cette pratique deviendra de plus en plus efficace car elle permet de sauver des vies”, explique le responsable des évacuations, un ambulancier en poste dans l’armée depuis un an.
La première intervention, dans la tranchée, est effectuée par les collègues eux-mêmes mais, plus tard, pour l’évacuation « nous avons besoin de quads à traction intégrale, rapides, petits et compacts. Il est également urgent que des civières spéciales arrivent car pratiquement à chaque sortie nous perdons ce matériel et nous ne pouvons pas le remplacer”, explique le moniteur.
Le cauchemar des drones
Le ciel rugit avec les bombardements venant de Chasiv Yar, une ville qui peut devenir la prochaine Avdiivka et que les Russes ont en ligne de mire en raison de sa position stratégique qui leur donnerait accès à Konstantinivka. Le gris plombé de l’hiver du Donbass a laissé place à un bleu inquiétant car il facilite le travail des drones. Les soldats s’efforcent d’apprendre rapidement à manier les armes, les instructeurs ont un œil sur eux et un autre sur le ciel par peur des engins qui sont devenus le pire cauchemar des Ukrainiens.
La formation dure quatre heures et sera répétée au moins trois fois. Ces soldats devront alors obéir aux ordres et rejoindre la ligne de défense que l’Ukraine tente de renforcer pour stopper l’ennemi en attendant l’arrivée de davantage d’armes et de munitions qui leur permettront de rêver à une contre-offensive. C’est un moment clé pour tester la loyauté des alliés de Kiev et les Ukrainiens le savent. Comme l’aide militaire prend du temps, il ne restera pas assez de troupes pour pouvoir utiliser cet armement.
Le dernier exercice est la pratique sur cible. Les hommes chargent les Kalachnikovs balle par balle. Ils le font avec amour, avec soin. Genou à terre, fusil sur l’épaule, oeil sur le réticule et les cibles… une photographie de Vladimir Poutine.
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