Une expédition punitive et une séquestration pour une affaire de trafic de cannabis

Une expédition punitive et une séquestration pour une affaire de trafic de cannabis

Il existe un petit monde qui préfère rester caché et trouver des solutions discrètes à ses problèmes. Dans le milieu des trafiquants de cannabis, les rivalités peuvent être violentes. Des concurrents peuvent s’intéresser à votre production. Mais il arrive parfois, comme dans le cas qui est actuellement jugé à Namur, que la police intervienne pour régler la situation.

C’était le 1er mai 2022 à Ohey, un village apparemment tranquille dans la région de Namur. Une mère se rend à la police. Sabine signale que son fils Benoît a été victime d’un vol de voiture la nuit précédente. L’enquête de voisinage révèle des incohérences dans leur récit.

La police se rend chez eux et découvre que le compteur d’électricité a été trafiqué. Des résidus de cannabis sont présents. Au grenier, ils trouvent des lampes typiques des plantations illégales de cannabis.

Benoît admet cultiver du cannabis. Mais il précise qu’il n’avait pas le choix. Il a été contraint de mettre en place cette installation chez lui. Cependant, au cours de l’enquête, il change d’avis et reconnaît avoir monté cette plantation. Avec Fatbardh, avec qui il vendait du cannabis, ils ont voulu augmenter leurs bénéfices. Les deux complices ont décidé de cultiver eux-mêmes. Mais ils ne connaissaient pas les techniques nécessaires.

Ils ont demandé conseil à Najime, un individu d’Herstal qui allait s’occuper de leur jardinage. Son téléphone a été localisé près du pylône d’Ohey à 156 reprises. Les résultats obtenus ne correspondraient pas à leurs attentes. Najime aurait alors abandonné leur projet, laissant une partie du matériel qui devait être détruit.

Une expédition punitive

Néanmoins, Benoît et Fatbardh ont décidé de lancer une nouvelle plantation seuls, ce qui n’a pas du tout plu à Najime. Dans la nuit du 21 au 22 avril 2022, vers 01 h 00 du matin, Benoît et sa mère Sabine ont été réveillés par des bruits suspects. Trois personnes se trouvaient dans la maison. Il est probable qu’ils convoitaient le cannabis. Tous deux ne se sont pas laissés faire. Sabine a jeté des casseroles, s’est débattue et est tombée de tout son poids alors qu’un inconnu tentait de l’étrangler.

Plus grave encore, Benoît a saisi un pistolet d’alarme trafiqué. Les trois intrus ont pris la fuite et ont escaladé un mur extérieur. Benoît a tiré et a touché le dernier dans le dos, provoquant une lourde chute et une fracture du genou.

Une séquestration de plusieurs heures

L’intrus, appelé Raimondo, a été contraint de ramper sur le sol et de retourner dans la maison. Il avait été touché par balle dans le dos et plus d’un an plus tard, la balle est toujours logée dans un de ses poumons. Benoît et Sabine l’ont interrogé, menacé et frappé, ce que le parquet considère comme des traitements inhumains et dégradants. Ils ne connaissaient pas Raimondo et voulaient notamment savoir où se trouvaient ses deux complices qui avaient réussi à s’enfuir.

Ce sont les risques du métier quand on rentre chez moi.

Les esprits étaient très échauffés. À un moment donné, Benoît a préféré cacher l’arme par peur que sa mère ne fasse quelque chose de dangereux. Elle aurait dit : “Ce sont les risques du métier quand on rentre chez moi”. Sabine était très agressive, lançant à son fils : “Tue-le”. Elle a utilisé une pince à épiler pour placer à hauteur de la blessure de balle de Raimondo. Était-ce pour extraire la balle ? Pour le torturer ?

Après plusieurs heures, Fatbardh a conduit Raimondo à Herstal. Un cousin de ce dernier l’a emmené à l’hôpital. Raimondo a expliqué qu’il avait été blessé par balle lors d’une altercation survenue à Liège, dans le quartier des sorties de la Cité ardente, appelé le Carré.

Un “match retour”

Mais ce n’était pas fini. Huit jours plus tard, six hommes s’en sont pris à Benoît à Ohey, lui volant sa voiture. Il était clair que c’était une représaille. Par peur de voir la situation s’aggraver, Sabine a appelé la police.

Suite à leurs témoignages, la police a remonté jusqu’à Raimondo, qui a dénoncé Najime. Il a expliqué que Najime, qu’il avait rencontré dans un café, lui avait proposé 20 000 euros pour “garder deux personnes pendant 30 minutes”. Il ne connaissait pas le troisième individu présent à Ohey.

Raimondo a réitéré ses déclarations devant le tribunal. “Cet individu m’a laissé à terre à 5 mètres de lui”, a-t-il déclaré, après que l’avocate de Najime a plaidé l’acquittement en estimant qu’il n’y avait aucune preuve de la présence de Najime à Ohey lors de cette nuit tragique.

Me Jonas Mathieu, l’avocat de Raimondo, a plaidé en faveur de son jeune client, considérant qu’il avait commis une erreur de jeunesse puisqu’il n’avait que 20 ans à l’époque. Il a demandé une peine avec sursis. Les deux hommes encourent de plus lourdes peines : le représentant du ministère public a requis quatre ans de prison contre Najime et 30 mois contre Raimondo.

Mais ce sont évidemment Benoît et Sabine qui risquent les peines les plus lourdes : le procureur a demandé sept ans de prison pour le fils et cinq ans pour la mère. Leurs avocats ont plaidé en faveur d’une peine avec sursis. Le jugement sera rendu le 1er septembre.

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