FIGAROVOX/TRIBUNE – Depuis le début du siècle la proportion de combustibles fossiles a à peine baissé. Face à ce constat, les experts en énergie Philippe Charlez et Nicolas Meilhan proposent une solution révolutionnaire pour réussir enfin la transition écologique, tout en réindustrialisant les pays occidentaux.
Philippe Charlez est expert énergie de l’Institut Sapiens.
Ancien conseiller scientifique auprès de France Stratégie, Nicolas Meilhan est membre d’ASPO France, l’Association pour l’étude des pics pétrolier et gazier.
Huit ans après les Accords de Paris, la décarbonation de l’économie mondiale n’a guère progressé. 2023 a battu les records de consommation de charbon, de pétrole et de gaz. Depuis le début du siècle la proportion de combustibles fossiles a à peine baissé passant de 87% en 2000 à 83% en 2023. Et ce malgré 6000 milliards de dollars investis en 15 ans dans les énergies renouvelables.
Dans ce panorama peu satisfaisant pour le climat, le charbon reste la seconde source d’énergie en importance : en 2022 il comptait pour 27% de la consommation d’énergie primaire et 35% de la génération électrique. Toutefois ces 35% cachent une très forte disparité : 95% de l’électricité charbonnière se concentre dans un “club” de 14 pays consommant plus de 100 térawattheures (TWh) d’électricité charbonnière par an et incluant la Chine, l’Inde, les États-Unis, le Japon, la Corée du Sud et l’Allemagne. L’électricité charbonnière étant responsable de 27% des émissions mondiales de GES, éradiquer ce cancer charbonnier devrait être la priorité des Conférences des Parties.
Un second sujet prioritaire récurrent aux COPs est d’aider les pays les plus pauvres à opérer leur transition énergétique mais aussi à s’adapter au réchauffement climatique dont 90% des victimes se situent dans les pays émergents. Selon l’économiste britannique Nicholas Stern, cela nécessiterait un transfert de 2500 milliards de dollars par an des pays riches vers les pays pauvres soit près de 4% du PIB de l’OCDE. Une somme totalement irréaliste quand on sait que le microfinancement de 100 milliards de dollars promis lors des Accords de Paris n’a toujours pas été mis en œuvre.
Sur la seule année 2022 une telle taxe aurait rapporté 1250 G$, soit la moitié de la somme avancée par Stern.
Philippe Charlez et Nicolas Meilhan
Le mécanisme que nous proposons consiste à imposer une taxe à l’import égale à un quart du pourcentage électrique charbonnier sur les biens exportés depuis le club des 14 vers tous les pays du monde. Ainsi, un produit importé d’Inde (74% d’électricité charbonnière) ou de Chine (61% d’électricité charbonnière) en France serait respectivement taxé à hauteur de 19% et 15%. Les fonds seraient collectés par un organisme international puis redistribués aux pays les plus pauvres pour qu’ils puissent à la fois assurer leur transition et s’adapter au réchauffement. Sur la seule année 2022 une telle taxe aurait rapporté 1250 milliards de dollars, soit la moitié de la somme avancée par Stern.
La méthode est triplement vertueuse. Réenchérissant le prix des produits exportés, elle encouragerait le «Club 14» à réduire le plus rapidement possible son électricité charbonnière. Tout pays réduisant sa production électrique charbonnière sous les 100 TWh sortirait automatiquement du Club et verrait sa taxe réduite à zéro. Elle inciterait aussi le consommateur à réorienter ses achats vers des produits à empreinte carbone plus faible devenus, grâce à la taxe, mécaniquement moins chers. Enfin elle permettrait aux pays les plus pauvres de financer massivement les projets d’atténuation et surtout d’adaptation indispensables à leur survie face au réchauffement climatique. De surcroît, elle permettrait d’éviter des exodes massifs des pays les plus sensibles notamment à la montée des océans.
La méthode ne pourrait être appliquée qu’avec un assentiment mondial et serait décidée au niveau de la COP. Et là est évidemment toute la difficulté notamment au sein de l’UE où seuls deux pays (l’Allemagne et la Pologne) seraient visés par la taxe. Enfin, compte tenu des énormes sommes collectées, la gestion des fonds devrait être gérée par un organisme de contrôle très rigoureux (dépendant de l’ONU) ceci afin d’éviter toute dérive dans des pays récepteurs souvent minés par la corruption.
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