Ville d’astéroïdes : Un théâtre psychologique à la Wes Anderson

Ville d’astéroïdes : Un théâtre psychologique à la Wes Anderson

L’AVIS DU « MONDE » – À NE PAS MANQUER

Il y a un peu plus d’un an, avec La dépêche française (2021), le dandy texan Wes Anderson rendait hommage à la presse écrite américaine et se rêvait rédacteur en chef d’un film foisonnant, où la mise en scène accomplissait un fantasme de mise en page. Tourné dans la foulée, marquant en cela une accélération inédite dans la carrière du cinéaste, Ville d’astéroïdes convoque, quant à lui, la tradition scénique, et pas n’importe laquelle : le théâtre psychologique de l’après-guerre, qui déferla à Hollywood avec des figures telles que Joshua Logan (Pique-nique, Arrêt d’autobus), Elia Kazan (Un tramway nommé désir, Sur les quais) ou Richard Brooks (La Chatte sur un toit brûlant).

Lire la critique : Article réservé à nos abonnés Dans « The French Dispatch », Wes Anderson s’amuse avec la légende dorée du journalisme

A cette école qui introduisit le jeu d’acteur moderne se réfère donc ouvertement un film se déroulant sur deux niveaux : dans une petite localité inventée pour les besoins d’une pièce et dans les coulisses de la fabrication de celle-ci. La dépêche française était un film sur l’écriture ; Ville d’astéroïdes en sera un sur le théâtre, prenant à bras-le-corps la question de l’acteur et de l’incarnation.

Lire aussi  Un chef cuisinier quitte le Château Frontenac pour s’installer aux Îles-de-la-Madeleine

La scène s’établit en 1955, dans le désert de l’Ouest américain. Asteroid City est une petite ville poussée à proximité d’un cratère creusé par la chute d’une météorite, depuis transformé en site touristique. Autour de la route rectiligne qui traverse les lieux, on décompte un le dîner flanqué d’un garage, un lot de bungalows, une rampe d’accès autoroutière jamais terminée et, au loin, quelque champignon sporadique d’essai nucléaire.

Mélancolie diffuse

Chaque année, les élèves du pays affluent en bus pour participer à un concours d’inventions scientifiques. Augie Steenbeck (Jason Schwartzman), photoreporter de guerre, y débarque avec son garçon, Woodrow (Jake Ryan), petit inventeur dit « Brainiac » (« le cerveau »), et ses trois fillettes, à peine relevés du décès de leur mère. Il y fait la rencontre de Midge Campbell (Scarlett Johansson), star hollywoodienne fraîchement divorcée, qui occupe le bungalow voisin. Au cours de la cérémonie, un alien descendu d’une soucoupe s’invite inopinément pour dérober l’astéroïde. Ce qui vaut à tout ce petit monde, dès le lendemain, d’être immobilisé par l’armée, qui verrouille le site sur-le-champ.

Lire aussi  Les fuites de GTA 6 révèlent que la météo aurait des effets dynamiques sur le monde du jeu

A la folle agitation de La dépêche française succède donc ce théâtre horizontal d’attente et d’immobilité, où tout fonctionne comme en modèle réduit. Dans cette plaine nue et presque absurde, Wes Anderson réunit une petite communauté de cœurs brisés (et l’un de ces castings faramineux dont le cinéaste a le secret : Tom Hanks, Tilda Swinton, Willem Dafoe, Margot Robbie, Matt Dillon, etc.), des êtres endeuillés auxquels manque tous quelque chose ou quelqu’un. Le récit en couleurs chatoyantes est entrelardé d’encarts « méta » en noir et blanc, où l’on suit les étapes de fabrication du spectacle. A l’auteur (Edward Norton) et au metteur en scène (Adrien Brody), il arrive d’avouer que le sens de la pièce leur échappe. C’est qu’Ville d’astéroïdes résiste à la tentation de la fable, à laquelle il préfère un vertige pirandellien : une myriade de personnages en quête de sens, perdus quelque part entre scène et coulisses, suspendus dans la mise en abyme.

Lire aussi  Goodreads a trop de pouvoir pour que sa modération soit aussi mauvaise

Il vous reste 48,03% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

dans un article qui peut être bien classé dans Google
#une #communauté #cœurs #brisés #quête #sens
publish_date]

Facebook
Twitter
LinkedIn
Pinterest

Leave a Comment

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.